Sous cloche
Se nourrir

“Les athlètes qui se nourrissent le mieux pourront reprendre plus vite”

Pour les diététiciens du sport, le confinement est propice à une alimentation plus grasse et plus sucrée. Léa Dandois Delaigue.

Dès le 11 mai,  les sportifs de haut niveau pourront reprendre un entraînement normal, ou presque. Après un confinement marqué par une activité réduite, les athlètes devront retrouver leur poids de forme et éviter la blessure.

Haltères faites maison, périmètre d’un kilomètre arpenté inlassablement. Durant le confinement, les sportifs de haut niveau ont dû adapter leurs méthodes d’entraînement. Et le retour à la normale n’est pas pour demain. Le ministère des Sports a publié une série de préconisations pour la reprise des sportifs.

Ismaël Bouzid, champion de France de Taekwondo (-80 kg), et Lucile Razet, vice-championne du monde junior de 400 m handisport, sont retournés chez leurs parents durant cette période, bien loin des structures de l’Insep (Institut national du sport, de l’expertise et de la performance). Si les athlètes reçoivent toujours des instructions de leurs coachs, il est rude de se plier à l’exigence du haut niveau.

« L’entraîneur joue un rôle pédagogique dans le suivi de l’alimentation », explique Serge Pieters, président de l’Union professionnelle des diplômés en diététique de langue française. « Dans l’esprit collectif, on pense qu’un sportif de haut niveau mange bien, mais sans éducation sur ces questions, les problèmes de nutrition sont les mêmes que dans la population générale », poursuit ce diététicien du sport.

Pour Serge Pieters, 80 % de l’entraînement passe par une bonne nutrition. Apports en calcium, sodium, zinc, .. rien n’est laissé au hasard dans le haut niveau. Mais durant cette « période anxiogène, la baisse d’entraînement pousse à manger plus pour compenser », souligne l’expert en diététique.

Aucune compétition à l’horizon 

L’absence d’échéance sportive renforce les difficultés du confinement. Vincent Melin est défenseur aux Scorpions de Mulhouse, club de hockey de première division. Dès le 17 mars, le championnat est définitivement à l’arrêt. Le défenseur des Scorpions n’est pas assuré qu’une nouvelle saison débutera en août. Il poursuit sa préparation depuis son appartement mulhousien, dans cette incertitude, et loin de son équipe. « Dès que je passe devant ma cuisine, j’ai envie d’attraper un truc à manger. C’est dur », souffle-t-il. 

Pour Ismaël Bouzid l’alimentation est d’autant plus importante qu’il pratique une discipline à catégories de poids. Avant le confinement, le taekwondoïste espérait décrocher sa place aux Jeux olympiques lors du Tournoi de qualification qui devait se tenir fin avril. 

 
 
 
 
 
Voir cette publication sur Instagram
 
 
 
 
 
 
 
 
 

F I G H T G A M E II #WayOfExcellence

Une publication partagée par Ismael Bouzid (@ismaelbouzid) le

Désormais confiné avec sa famille, Ismaël Bouzid reconnaît manger différemment, « des plats plus en sauce par exemple »Le jeune athlète de 21 ans mentionne avoir pris 2 kg par rapport à son poids de forme. Pour cet espoir français du taekwondo, la pesée n’est pas une obsession pendant le confinement : « Je redescendrai progressivement à 80 kg à l’approche des compétitions », assure-t-il.

Troubles alimentaires et blessures 

Laura Tajan, diététicienne nutritionniste du sport, souligne les problématiques des disciplines où « le poids est la cible à atteindre ». « Il y a des risques de troubles alimentaires. Certains athlètes se déshydratent sévèrement à l’approche des compétitions », se désole-t-elle. Au lendemain du confinement, cette diététicienne craint que certains sportifs cherchent à perdre du poids trop rapidement.

Serge Pieters soulève également les risques de blessures « pour les athlètes qui auront pris du poids pendant le confinement ». En voulant compenser le « temps perdu », certains sportifs auront tendance à s’entraîner en surcharge. Il alerte sur les risques de claquages qui pourraient être accentués par « des carences, si l’alimentation n’a pas été assez variée ». Le diététicien préconise des exercices d’endurance, et le respect d’une période de transition. 

Depuis le début du confinement, Lucile Razet doit adapter son entraînement. Lucile Razet

Mais tout n’est pas à jeter dans ce confinement pour les sportifs de haut niveau. Si Nicolas Vermeulen, expert en diététique du sport, alerte sur une reprise sans transition, il note que « les athlètes ont pu se régénérer et prendre du temps pour eux comme ils en ont rarement l’occasion. » Lucile Razet profite de cette période pour soigner son alimentation : « Je cuisine davantage depuis le début du confinement, et je ne suis pas trop du genre à manger des aliments très gras ou sucrés », explique la pensionnaire de l’Insep. Pour elle, comme Ismaël Bouzid et Vincent Melin, « la reprise sera progressive ».  

Related posts

«Je vis bien ma nutrition en confinement»

Margot MICHEL

Aux Etats-Unis, une saison des barbecues pas comme les autres

Léa DANDOIS

« Les repas ne sont pas aussi incroyables qu’en Tunisie, ça affecte mon humeur »

Aurore THIBAULT